Une prédisposition génétique au cancer du sein est dépistée dans le cadre d’une enquête oncogénétique réalisée dans la famille de patientes atteintes d’un cancer du sein. Cette maladie est très fréquente chez la femme : le risque de la développer est de l’ordre de 5% pour n’importe quelle femme au cours de sa vie. Néanmoins, parmi celles qui en sont touchées, certaines étaient prédisposées génétiquement à la développer. Savoir pour Choisir fait un point sur les avancées de la recherche, sur les indices actuels de prédisposition ainsi que quelques notions utiles à savoir en cas de suspicion de terrain génétique.
Une constante découverte
Le 17 août 2023, des chercheurs des universités de Laval (Québec) et de Cambridge (Royaume-Uni) ont révélé avoir fait la découverte de nouveaux gènes de prédisposition au cancer du sein. C’est le cas du MAP3K1, qui semble avoir une réelle incidence sur la survenue d’un cancer lorsqu’il est muté. Ces chercheurs évoquent la découverte d’une trentaine de gènes mis en cause.
Nature Genetics, Aout 2023
La recherche génétique en matière de cancer du sein est en constante évolution, elle est même fulgurante. En 1995 fut découverte la mutation sur les gènes BRCA1 et BRCA2, et durant quelques décennies ils restèrent les seuls recherchés et mis en cause lors d’un dépistage génétique. Mais depuis plusieurs années, la recherche ne cesse de faire des bonds en avant. Le Groupe Génétique et Cancer recommande en plus aujourd’hui l’analyse automatique des gènes PALB2, TP53, CDH1, PTEN, RAD51C, RAD51D, MLH1, MSH2, MSH6, PMS2, CHEK2 et EPCAM. Cette évolution permanente met en évidence plusieurs choses : nous misons beaucoup d’espoir sur cette évolution afin de rendre un jour réversible un gène muté. Aussi, la découverte ininterrompue de nouvelles prédispositions signifie qu’une mutation génétique non découverte à ce jour n’est pas une mutation inexistante. Ainsi nous devons aussi accompagner les familles dont le dépistage a été rendu négatif. En effet, ces dernières doivent repasser le test génétique à mesure qu’il évolue.
Les notions à connaître
Les indices de prédisposition génétique au cancer du sein
La multiplicité des cancers dans une même famille peut laisser présager une prédisposition au cancer du sein. Il n’est toutefois pas nécessaire d’avoir beaucoup de cas de cancers de la même lignée pour émettre des suspicions. Parfois seul un ou deux cancers du sein suffisent à ce que l’on se pose la question. C’est le cas si ces mêmes cancers présentent d’autres indices de prédisposition. Par exemple, si ce ou ces cancers sont survenus tôt, avant 50ans. Plus les patientes sont jeunes, plus la suspicion sera forte. Également si un homme de la famille a été touché par un cancer du sein, on suspecte très fortement la présence d’un gène défectueux. Puis pour finir, si dans les cancers du sein existant, certains ont été bilatéraux, c’est-à-dire des deux côtés.
Agir en cas de doute
Si vous identifiez votre famille dans certains de ces indices de prédisposition, seul un généticien peut déterminer s’il est possible d’ouvrir un dossier de dépistage génétique. En effet, la loi française protège nos ADN et empêche de la manipuler à notre guise. Votre demande doit faire l’objet d’une réelle suspicion de prédisposition au cancer si vous souhaitez accéder au dépistage génétique. Il vous faudra envoyer ces « preuves » à un pôle génétique pour en faire la demande. Il en existe un dans tous les grands pôles de recherche et les CHU. Munissez-vous d’un maximum d’informations, des dossiers médicaux des personnes ayant été malades afin que de rendre efficace le travail des spécialistes.
Les risques de développer un cancer du sein à prédisposition génétique
Etablir un pourcentage de risque n’est pas chose aisée en fonction des données fournies par le/la patient/e et celles mise à disposition par la science. Ainsi il est tout à fait possible d’évaluer un risque sur les gènes bien connus comme les BRCA1 et 2. Ils sont estimés au minimum autour de 50% pour BRCA2 et de 65% pour BRCA1 au cours de la vie, mais il peuvent parfois atteindre 90% en fonction d’autres facteurs environnementaux, hormonaux, de densité mammaire… Pour les gènes découverts plus récemment, il n’est pas toujours possible de délivrer un pourcentage de risque, ce sera alors à l’onco-généticien d’en discuter avec le/la patient/e.
Le pourcentage de risque, une donnée utile
Le pourcentage permet de définir à quelle fréquence et à quel degré devront avoir lieu les examens de contrôle d’une patiente à prédisposition génétique. Plus le chiffre sera élevé, plus les examens seront rapprochés et approfondis. Le pourcentage de risque peut être vécu comme un choc pour la personne qui le reçoit, mais il permet de clarifier des doutes, souvent vécues des années durant. Il est souvent l’élément déclencheur des femmes pour aller pratiquer une opération préventive.
Que se passe-t-il lorsque aucun gène de prédisposition n’est découvert à l’issu d’une recherche génétique ?
Les femmes ayant des antécédents familiaux de cancer du sein mais qui ne sont pas porteuses de mutation génétique peuvent être considérées à haut risque par la consultation oncogénétique. En effet, la médecine n’ayant pas encore découvert tous les gènes responsables de l’apparition des cancer du sein, il est important de suivre ces cas non-identifiés de près. Il devient alors de plus en plus fréquent qu’une prise en charge totale soit appliquée sur une opération préventive en cas de non-identification de mutation génétique lorsque le haut risque est reconnu.
Alice Detollenaere
A écouter également : Le témoignage d’Emilie Fontaine, porteuse d’une mutation génétique inconnue
Sources : Sources : Lynch HT, Silva E, Snyder C, Lynch JF. Hereditary breast cancer: part I. Diagnosing hereditary breast cancer syndromes. Breast J 2008; 14 : 3-13. Modalités spécifiques de dépistage pour les femmes à haut risque, Haute Autorité de Santé
Bonjour,
Bravo pour votre site mais je tiens à apporter un éclairage en plus sur cet article. On limite trop souvent le discours de certaines mutations génétiques au cancer du sein. Dans le cas de ma famille, le diagnostic a été très tardif car la mutation vient de mon grand-père paternel qui a eu un cancer du pancréas. Ma tante a eu plusieurs cancers du sein et mon père, un cancer de la prostate. Et ce n’étaient pas des cancers précoces. Pourtant, c’est bien la mutation du gène BRCA2 qui est en cause et même les médecins font rarement le rapprochement. Les tests génétiques ou du moins les interrogatoires devraient être plus systématiquement poussés. Je suis moi-même porteuse et le corps médical m’a dit a plusieurs reprises que je ne risquais rien si c’était ma tante paternelle qui avait un cancer du sein. A ta disposition pour témoigner plus longuement si tu le souhaites.